Luxation acromio-claviculaire

Comprendre la luxation acromio-claviculaire

L’épaule constituée de la clavicule et de l’omoplate permet de relier le bras à la cage thoracique.

La clavicule est très peu mobile car son extrémité interne est solidement accrochée par de puissants ligaments au sternum au niveau de l’articulation sterno-claviculaire.

L’omoplate est un os plat très mobile qui glisse sur la partie postérieure de la cage thoracique à laquelle elle est amarrée par des muscles ce qui permet d’augmenter la mobilité du bras. L’omoplate est attachée à la clavicule par l’une de ses extrémités appelée acromion. Cette articulation acromio-claviculaire, peu mobile, est stabilisée par 3 ligaments :

  • Le ligament acromio-claviculaire reliant l’extrémité externe de la clavicule à l’acromion
  • Les deux ligaments coraco-claviculaires (conoïde et trapézoïde) reliant la coracoïde, située sur la face antérieure de l’omoplate, et le quart externe de la clavicule.
Anatomie de l’articulation acromio-claviculaire
Anatomie de l’articulation acromio-claviculaire

La luxation acromio-claviculaire correspond à un « déboitement » de cette articulation. Il est le plus souvent provoqué par une chute sur le moignon de l’épaule qui entraîne un abaissement de l’omoplate, très mobile, alors que la clavicule, peu mobile, reste fixe car solidement accrochée au sternum.

Il n’est donc pas étonnant que ces luxations acromio-claviculaires soient le plus souvent la conséquence de traumatismes sportifs par contact ou par chute sur le moignon de l’épaule.

Classification des luxations acromio-claviculaires

L’abaissement de l’omoplate lors de la chute sur le moignon de l’épaule va entraîner des lésions ligamentaires, d’abord du ligament acromio-claviculaire puis des ligaments coraco-claviculaires. En cas de traumatisme plus violent des lésions de la chape musculaire trapèzo-deltoïdienne peuvent survenir.

La classification de Rockwood est la plus utilisée et repose sur ces lésions ligamentaires et musculaires engendrées par le traumatisme.

Stade 1

Il n’y a pas de rupture ligamentaire. Seul le ligament acromio-claviculaire supérieur est distendu. L’articulation acromio-claviculaire est douloureuse mais il n’y a pas de déformation de l’épaule ni d’anomalie radiologique.

Stade 1 de Rockwood
Stade 1 de Rockwood

Stade 2

Seul le ligament acromio-claviculaire supérieur est rompu. En dehors de la douleur de l’articulation acromio claviculaire, les signes cliniques et radiologiques sont mineurs voire inexistants.

Stade 2 de Rockwood
Stade 2 de Rockwood

Stade 3

Les ligaments acromio-claviculaire et coraco-claviculaires sont rompus. L’omoplate n’étant plus retenue par la clavicule est attirée par le poids du bras vers le bas. Il apparaît alors une saillie caractéristique de l’extrémité de la clavicule. A ce stade, la luxation peut être réduite en remontant l’omoplate à sa place par pression ascendante du bras sous le coude.

Stade 3 de Rockwood
Stade 3 de Rockwood

Stade 4

Les lésions ligamentaires sont identiques à celles du stade 3 mais l’extrémité de la clavicule est incarcérée dans le muscle trapèze rendant la luxation irréductible.

Stade 4 de Rockwood
Stade 4 de Rockwood

Stade 5

Les lésions ligamentaires sont identiques à celles du stade 3 mais la sangle musculaire trapèzo-deltoïdienne qui surplombe l’épaule est largement désinsérée entraînant un déplacement majeur et une saillie sous-cutanée très importante de la clavicule. C’est une lésion rare.

Stade 5 de Rockwood
Stade 5 de Rockwood

Stade 6

Il est exceptionnel. C’est une luxation inférieure de la clavicule dont l’extrémité est parfois coincée sous la coracoïde.

Stade 6 de Rockwood
Stade 6 de Rockwood

Quel bilan faut-il faire ?

Les radiographies standard constituent l’examen complémentaire de choix et permettent de constater l’élargissement de la distance acromio-claviculaire. Les techniques d’imageries plus sophistiquées comme le scanner ou l’IRM sont rarement nécessaires.

Quels sont les traitements possibles ?

Le traitement non chirurgical

Il repose sur l’application d’une poche de froid et sur l’association d’un traitement antalgique et anti-inflammatoire pour limiter les douleurs. La mise en place pendant quelques jours d’une attelle permettant de soulager l’épaule du poids du bras peut également être utile.

Le traitement chirurgical

Une multitude de traitements chirurgicaux ont été décrits que ce soit par des techniques conventionnelles « à ciel ouvert » ou par des techniques arthroscopiques.

L’objectif du traitement chirurgical est de réduire la luxation et de maintenir de façon stable cette réduction. Lorsque l’opération est effectuée à un stade précoce, il est également souhaitable d’obtenir une cicatrisation des ligaments rompus.

Les techniques arthroscopiques ont l’avantage d’être mini-invasives et responsables d’un préjudice esthétique minime mais elles ne permettent pas de réduire complètement la luxation puisqu’elles laissent persister un tiroir antérieur sauf à les associer à un brochage ou à un laçage acromio-claviculaire nocif pour le cartilage de cette articulation. Elles sont également responsables d’un taux plus important de perte de correction et certaines de ces techniques peuvent se compliquer d’une fracture du quart externe de la clavicule.

Je privilégie depuis plusieurs années une stabilisation par ligament artificiel Acrolig® qui présente l’avantage de maintenir de façon extrêmement solide à la fois la réduction du diastasis coraco-claviculaire et du tiroir antérieur acromio-claviculaire sans porter atteinte au cartilage. Lorsque la luxation est récente, une suture des ligaments peut y être associée. Il s’agit d’une technique éprouvée qui a fait la preuve de son efficacité, notamment chez de nombreux rugbymen et judokas professionnels.

Quand faut-il opérer ?

Seuls les stades 4, 5 et 6 sont des indications chirurgicales formelles en raison de l’incarcération de la clavicule et des lésions musculaire de la chape trapèzo-deltoïdienne.

Il est également communément admis qu’il n’y a pas d’indication à opérer les stade 1 et 2 qui n’entraînent pas de déformation de l’épaule et pour lesquels le traitement non chirurgical donne d’excellents résultats.

Il n’existe pas, en revanche, de consensus pour les luxations de stade 3. Pour les patients non algiques sans exigence physique importante, de bons résultats sont obtenus par le traitement non chirurgical. A l’inverse, pour les patients jeunes et chez les sportifs, une stabilisation chirurgicale précoce est privilégiée pour obtenir une restauration anatomique et fonctionnelle de l’épaule ainsi que le soulagement des phénomènes douloureux.

Quelles sont les conséquences en l’absence d’opération ?

L’absence d’indication opératoire peut concerner les stades 1, 2 et 3 de la classification de Rockwood.

L’évolution des stades 1 et 2 est le plus souvent excellente. Des douleurs résiduelles par dégénérescence arthrosique de l’articulation acromio-claviculaire peuvent survenir à long terme mais elles demeurent rares.

Pour les stades 3, il persiste une déformation de l’épaule source potentielle de préjudice esthétique d’autant plus visible que le patient est maigre. Des mouvements anormaux avec des sensations de claquements et de ressauts acromio-claviculaires peuvent s’observer. Avec le temps l’évolution vers une arthrose de l’articulation acromio-claviculaire est possible pouvant être responsable de douleurs.

Déformation de l’épaule des stades 3 et 5
Déformation de l’épaule des stades 3 et 5

Déroulement de l’intervention :

Avant l’intervention

L’intervention est précédée d’une consultation d’anesthésie et éventuellement d’un bilan préopératoire visant à vérifier que le patient est physiquement apte à se faire opérer et à minimiser le risque de complications post-opératoires.

L’intervention

L’intervention se déroule dans un bloc opératoire conforme à des normes strictes de propreté et de sécurité. Le patient est installé sur une table d’opération en position demi-assise. La durée de l’intervention est d’environ 1 heure. Cette intervention se déroule sous anesthésie générale. Elle est souvent associée à un bloc anesthésique inter-scalénique qui est une anesthésie complémentaire qui maintient l’épaule et le bras endormis pendant plusieurs heures et limite les douleurs post-opératoires.

La cicatrice est longitudinale située à la face supérieure de l’épaule et mesure environ 6-7 centimètres.

La luxation acromio-claviculaire est réduite et la réduction est maintenue par la mise en place du ligament artificiel Acrolig®.

En cas de luxation récente, les ligaments coraco-claviculaire sont suturés et les éventuelles lésions de la chape trapézo-deltoïdienne sont réparées.

En cas de luxation ancienne, s’il existe une atteinte du cartilage de l’articulation acromio-claviculaire responsable de douleurs, le quart externe de la clavicule est réséqué au cours de l’opération.

A la fin de l’intervention, un drain aspiratif peut être mis en place au niveau de la cicatrice pour éviter la constitution d’un hématome.

Après l’intervention 

L’épaule est endormie par le bloc inter-scalénique pendant 12 à 18 heures. Les médicaments et le glaçage participent également efficacement à la prise en charge des douleurs post-opératoires.

L’opération peut se dérouler en ambulatoire (sortie le jour même de l’opération) ou en hospitalisation courte d’une nuit. A la sortie de la clinique, le patient opéré peut directement regagner son domicile.

L’épaule est maintenue dans une écharpe orthopédique pendant 6 semaines au cours desquelles il n’y a pas de rééducation afin de ne pas risquer de perdre la réduction pendant la phase de cicatrisation car les contraintes qui s’exercent sont extrêmement importantes.

Une consultation avec radiographies de contrôle est programmée avec le chirurgien dès la sortie du patient de la clinique. Elle a lieu 4 à 6 semaines après l’intervention et son but est de vérifier le maintien de la réduction acromio-claviculaire et l’absence de complication. Une seconde consultation de contrôle est en général souhaitable environ 3 mois après l’opération.

La durée de l’arrêt de travail est variable et dépend de la profession. Il est en général compris entre 1 mois ½ et 2 mois. Il est plus long en cas de travail manuel.

La conduite automobile est reprise 2 mois après l’intervention.

La reprise des sports utilisant l’épaule opérée se fait environ 3 à 4 mois après l’intervention.

Les risques liés à l’intervention

Le risque nul n’existe malheureusement pas en chirurgie. Toute intervention comporte des risques et a ses limites. Il faut les accepter ou sinon ne pas se faire opérer. Toutefois, si une intervention vous est proposée, c’est que le chirurgien et le médecin-anesthésiste estiment que le bénéfice attendu est nettement supérieur au risque encouru.

Certains risques sont communs à tous les types de chirurgie. C’est le cas de l’infection où des microbes viennent envahir la zone opérée. C’est une complication heureusement rare mais qui, lorsqu’elle survient, nécessite une nouvelle intervention et la prise d’antibiotiques. Un hématome peut également survenir au niveau de la zone opérée. Il est habituellement évité ou limité par la mise en place d’un drain aspiratif en fin d’intervention qui sera retiré dans les jours suivant l’opération. Toutefois, en cas de saignement important au cours de l’intervention ou au décours de celle-ci, une réintervention pour stopper l’hémorragie ou une transfusion sanguine peuvent être nécessaires.

Des caillots de sang peuvent se former dans les veines du bras (thrombophlébite) ou des poumons (embolie pulmonaire). Si le médecin anesthésiste juge ce risque important, il vous donne un traitement pour l’éviter.

Dans de rares cas, l’épaule reste raide, chaude et douloureuse pendant de longs mois après l’opération. Cette complication qui s’appelle l’algodystrophie est imprévisible et est parfois longue à guérir.

D’autres complications plus rares peuvent également survenir. Des vaisseaux sanguins (artère, veines) peuvent être lésés accidentellement et nécessiter un geste vasculaire (pontage). Des nerfs peuvent également être accidentellement abîmés au cours de l’intervention avec un risque de paralysie ou de perte de sensibilité du membre opéré qui peuvent être transitoires ou définitives.

Enfin, il peut y avoir une légère perte de la réduction acromio-claviculaire, la plupart du temps sans aucune conséquence fonctionnelle.

En cas d’inquiétude concernant l’intervention, n’hésitez pas à questionner votre chirurgien ou le médecin anesthésiste afin qu’ils répondent à vos interrogations.

En résumé

Quand opérer ?

En cas de luxation acromio-claviculaire de stade 4, 5 et 6. Et de stade 3 chez les sujets jeunes et sportifs.

But de l’opération

Réduction de la luxation et stabilisation acromio-claviculaire

Quelle anesthésie ?

Générale

Durée d’hospitalisation

Ambulatoire ou hospitalisation courte (1 nuit)

Immobilisation post-opératoire

Écharpe orthopédique 6 semaines

Durée de la rééducation

1 à 3 mois

Durée de l’arrêt de travail

6 à 8 semaines en cas de travail sédentaire, plus si travail manuel

Reprise de la conduite auto

2 mois après l’opération

Reprise du sport

3 à 4 mois après l’opération

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